lundi 23 février 2009

Marrakech, 14 septembre 1938



Georges Orwell (Eric Arthur Blair)

Oiseaux vus pendant le voyage en chemin de fer Tanger-Casablanca-Marrakech. Ibis extrêmement nombreux, crécerelles assez communes ainsi que deux sortes de grands faucons ou rapaces, quelques corbeaux solitaires ressemblants beaucoup à l’oiseau anglais. Pas de cigognes, bien qu’on dise qu’il en existe ici. Très peu de perdrix. Des chardonnerets apparemment identiques aux anglais, courants à Marrakech. Vu un homme portant un lièvre, sinon aucun quadrupède sauvage. Il n’y en a vraiment pas, dit-on, excepté quelques lièvres & chacals au Maroc fr. Quelques chameaux au Maroc esp., mais guère communs jusqu’au sud de Casablanca. En général, un chameau, par ici, semble avoir 18 mains de haut. Tous sont extrêmement maigres & ont des plaques calleuses aux articulations. La plupart sont muselés. Les ânes à Marrakech sont légèrement moins surchargés & dociles qu’à Tanger.

Le journal d'Eric Blair
Présenté par Athur Morneplaine


vendredi 20 février 2009

Junkie, novembre 1969






Brusquement c'est la fanfare.

Sans vraiment qu'une aube comme en europe, longue et progressive, l'ait précédé, le soleil surgit.

Je le regarde en face, rouge comme la gueule d'un haut fourneau et il irradie un délire assourdissant de symphonies, d'hymnes, de choeurs.
Il monte dans sa majesté comme un dieu qui s'offre aux hommes. et plus il monte, plus le sang bat dans mes veines, plus la terre s'irrigue de sang et de sève sous moi, plus l'air se charge de pollens, de parfums, de molécules de vie et de reproduction.

En bas, dans la vallée, les coqs se répondent à tue-tête. Autour de moi, tous les oiseaux hurlent à la fois dans les arbres.

Des larmes de joie coulent de mes yeux. Enfin, la vie est revenue, ressuscitée ! Les fantômes sont chassés, les mauvaises pensées balayées...


Katmandou (1969)

"Flash" de Charles Duchausssois
Les mémoires d'un junkie


jeudi 5 février 2009

La mort viendra et elle aura tes yeux

© Bertrand Linet mai 2006

La mort viendra et elle aura tes yeux. Tes yeux d'amande douce. Tes lèvres de lauriers roses. Comme toujours, tu seras de l'autre côté des choses, avec le vent dans les cheveux, le soleil entortillé dans tes cils. Je l'attendrai la tête haute. Je lui dirai bonjour et je m'enflammerai d'un seul coup. Inutile de bondir dans la futilité des princes. Inutile de crier au mensonge, de fermer la porte aux sortilèges. Tout passe. La brindille elle même n'est qu'un pont d'argile au dessus du sourire. La mort viendra et elle aura tes yeux. Je l'accueillerai comme j'accueille ta main, avec une image couleur de printemps. Nous partirons ensemble vers la mer si lointaine. Nous entrerons dans le silence des prairies, dans les vagues de l'oubli. Tout sera dit en un instant puisqu'il n'y a rien à dire. Les projets - un tas d'herbes en feu sur l'horizon.

A la frontière,

Loin des charniers, loin des hivers,

Une enfant, quelque part, lâchera son oiseau.

René Barbier

musique secrète