mercredi 25 mars 2009

Magic Bus 2001




« Dans votre livre, vous pourrez écrire que ce sont les hippies qui ont découvert la Turquie, me lance Aderm Colpan quelques minutes plus tard.

- Et que le tourisme turc est né dans notre pastane (patisserie), ajoute namik en venant me rejoindre à ma table avec son neveu.

- A l'époque, notre pays n'avait pas de politique touristique, pas de téléphone, pas de centre d'information, explique Aderm, en tripotant de ses ongles longs et soignés les tortillons bien nets de sa moustache. Parce que c'était leur nature, mon oncle et mon père voulaient aider nos jeunes visiteurs à trouver leur chemin. Alors ils affichaient des petites annonces sur le mur, indiquant le hammam le plus proche ou le prochain bateau pour Antalya.

- Notre tableau d'affichage a été le premier panneau de signalisation de la piste », confirme Namik.

Grâce à lui, les jeunes échangeaient des conseils de voyage, découvraient l'adresse de l'ambassade d'Iran et vérifiaient qu'elle était la route la plus sûre pour traverser l'Afghanistan. « Doux original, 21 ans, cherche nana jouant de la guitare prête à partir pour l'orient mystique », annonçait un message. « Quelqu'un sait-il où loger à Kaboul ? » demandait un autre. Par moments, les annonces se présentaient en liasse si épaisses qu'il fallait plutôt des clous que des punaises pour les fixer au tableau. Aujourd'hui, à l'instar des griffonnages d'une tradition orale, les messages proprement dits sont presque tous perdus.

« Et nous, de notre coté, nous sommes reconnaissants aux hippies » admet Adem. Toute une vie passée à servir des sucreries l'a imprégné d'une espèce de vague douceur. « Parce que ce sont eux qui nous ont appris à faire le Nescafé ».


Magic Bus de Rory Maclean