samedi 23 mai 2009

Le vieux qui lisait des romans d'amour


Il lisait lentement en épelant les syllabes, les murmurant à mi‑voix comme s'il les dégustait, et, quand il avait maîtrisé le mot entier, il le répétait d'un trait. Puis il faisait la même chose avec la phrase complète, et c'est ainsi qu'il s'appropriait les sentiments et les idées que contenaient les pages.Quand un passage lui plaisait particulièrement, il le répétait autant de fois qu'il l'estimait nécessaire pour découvrir combien le langage humain pouvait aussi être beau.
Il lisait en s'aidant d'une loupe, laquelle venait en seconde position dans l'ordre de ses biens les plus chers. Juste après le dentier.


Le vieux qui lisait des romans d'amour de Luis Sepulveda


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samedi 2 mai 2009

El Oued, 4 août 1899



Il est des heures à part, des instants très mystérieusement privilégiés où certaines contrées nous révèlent, en une intuition subite, leur âme, en quelque sorte leur essence propre, où nous en concevons une vision juste, unique et que des mois d'étude patiente ne sauraient plus ni compléter, ni même modifier. Cependant, en ces instants furtifs, les détails nous échappent nécessairement et nous ne saurions apercevoir que l'ensemble des choses... État particulier de notre âme, ou aspect spécial des lieux, saisi au passage et toujours inconsciemment ?
Je ne sais...
Ainsi, ma première arrivée à El Oued, il y a deux ans, fut pour moi une révélation complète, définitive de ce pays âpre et splendide qui est le Souf, de sa beauté particulière, de son immense tristesse aussi.


Isabelle Eberhardt - Lettres et Journaliers


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