samedi 24 juillet 2010

Aux bords du Gange



Crédit photo: Mitchel KanashKevich/Getty Images (détails)

Nous approchions du mois d'Ashwin (septembre). La rivière était en crue. De l'escalier qui descendait dans l'eau, quatre marches seulement émergeaient encore à la surface. La nappe liquide affleurait les bords aux endroits où la rivière s'abaissait, là où les « Kachus » poussaient en touffes compactes sous les branches des bosquets de mangos. En cet endroit, le courant formait un coude et laissait à découvert trois grands tas de briques amoncelées depuis longtemps. Les bateaux de pêche, amarrés aux troncs des « bablas », se balançaient soulevés par les flots à la pointe du jour. Les grands roseaux qui recouvraient le banc de sable captaient les premiers rayons du soleil ; ils commençaient à fleurir sans avoir atteint encore leur plein épanouissement.
Les barques gonflaient leurs voiles sur la rivière ensoleillée. Le prêtre brahmane portant ses vases rituels se disposait à prendre son bain. Les femmes, par groupes de deux ou trois, venaient puiser de l'eau. C'était l'heure où Kusum avait coutume d'apparaître au haut des marches et de se baigner.


Aux bords du Gange de Rabindranath Tagore


vendredi 9 juillet 2010

Couleurs de femme



Crédit photo

Au printemps des p'tits oiseaux
j'ai vu des femmes turquoise à l'iris orangé
des femmes fleurs en robes coquelicots
le corsage ouvert sur l'ambre de la peau

Au printemps des p'tits oiseaux
j'ai connu des femmes palissandre
aux yeux étoilés de jade
et les cuisses entrouvertes
sur un jardin ruisselant d'incarnat

Au printemps des oiseaux
j'ai connu des femmes pêches
au regard fascinant d'émeraude
la peau veloutée et la chair blanche

Au printemps des salauds
j'ai vu des femmes polychromes
à la peau bleue tuméfiée
et des marbrures roses
en souvenir d'essence

Au printemps des salauds
j'ai déposé quelques roses.
une pervenche et la belle ancolie
sur ce lit de mousse où tu t'étioles
pour cause de vitriol


Lézardes et Murmures de Laurent Chaineux